Dexia sous gravier ?

Selon Charles Gave, qui reprend ce qui se dit dans le monde financier, « Dexia serait en train d’encourir une perte gigantesque et aurait déjà consommé les 55 milliards de recapitalisation accordés l’automne dernier » !

« Comme le lecteur le sait, je m’attendais à ce que le marché obligataire français « dévisse » après les élections du 6 mai et que nous ayons une baisse du marché des actions accompagnée d’une hausse du dollar et d’une intensification de la crise européenne.

Tout se passe comme prévu, si ce n’est que le marché obligataire français, à la place de baisser a fortement monté, ce qui est d’autant plus bizarre que les CDS (credit default swaps) sur la France sont fortement montés depuis le 6 mai, ce qui ne se passe que quand la défiance augmente sur la France.

Dans mon expérience quand quelque chose d’incongru se produit dans les marchés financiers, cela veut dire en général qu’une banque, une banque centrale ou les deux à la fois sont en train de faire quelque chose de pas très catholique et que les prix en sont affectés de façon anormale.

Nous sommes peut être dans une telle situation.

J’hésite à écrire ces lignes tant pour l’instant il ne s’agit que de rumeurs et il faut que le lecteur prenne ce qui suit avec une solide dose de scepticisme, mais enfin, il n’y a pas de fumée sans feu.

Le monde financier à Paris bruisse de rumeurs selon lesquelles Dexia connaîtrait de grandes difficultés.

Dexia, c’est cette grande banque spécialisée dans les prêts aux communautés locales, créée par Pierre Richard, ancien haut fonctionnaire Français très marqué à gauche et qui est conjointement détenue par la Belgique , la France et le Luxembourg (3 % pour le petit pays).

Selon les rumeurs que j’ai mentionnées plus haut, cette banque aurait massivement assuré ses clients qu’en cas de baisse des taux longs français, ils prendraient la perte que cela pourrait entrainer à ces clients à leur compte. En termes clairs pour le lecteur non spécialiste, cela veut dire que Dexia s’est mise massivement à découvert sur les obligations de l’Etat français et il semble qu’elle n’ait pas couvert ce risque.

Comme les obligations françaises ont monté plutôt que baissé, Dexia serait en train d’encourir une perte gigantesque et aurait déjà consommé les 55 milliards de recapitalisation accordés en automne dernier. Perdre 55 milliards en 6 mois n’est pas à la porte du premier banquier venu, fût-il sorti de nos grandes écoles.

Je n’ai aucune idée de ce que Dexia a vendu ou acheté pour perdre autant d’argent, mais la perte est là…

Pour mettre les choses en perspective, la première page des journaux il y a quelques semaines étaient remplies d’articles sur les pertes encourues dans ses opérations de trading par JP Morgan, qui se montaient à 2 milliards de dollars.

Les pertes de Dexia seraient de 35 fois supérieures à ce montant et devront être couvertes in fine par les Etats actionnaires.

La Banque de France, la Banque centrale de Belgique seraient en train de dénouer les positions et seraient donc forcées de racheter les positions à découvert de Dexia, ce qui expliquerait la hausse du marché obligataire français.

Encore une fois , il ne s’agit que de rumeurs et tout cela n’est peut être que de la finance fiction.

Je dis toujours que les crises financières ont des similarités avec la pêche à la dynamite.

Quand une explosion se produit à grande profondeur, les petits poissons remontent les premiers le ventre à l’air, les baleines beaucoup, beaucoup plus tard…

Si ces rumeurs sont vraies, alors je peux assurer le lecteur que c’est là l’une des plus belles baleines que j’aurai vu en quarante ans de carrière et que nous n’avons pas fini d’entendre parler de Dexia… »

Charles Gave, Institut des libertés, le 28 mai 2012

N.B. Addendum Dexia

« Chers lecteurs,

Avant de publier ma petite note technique sur Dexia j’ai beaucoup hésité.

Le lecteur averti aura remarqué que le style de cette note était fort diffèrent de mes productions habituelles, sur la forme.

Renseignements pris aux meilleures sources, il semble qu’il y ait eu confusion chez mon informateur (Les pages saumon du Figaro) entre garanties de financement et garanties de passif ainsi que sur la politique actuelle de prises de risque de Dexia.

Les Etats français ou belge garantissent les financements de Dexia à hauteur de 55 milliards mais ne garantissent en rien les pertes.

Dexia est en plein démantèlement et serait bien incapable de prendre des positions à découvert sur le marche des OAT, son seul but étant de vendre ses positions à long terme pour procéder à ce démantèlement en bon ordre .

Dont acte.

Et entre le lecteur et moi, je préfère de loin avoir eu tort dans mon analyse à cause de sources erronées plutôt que d’assister passif à cette situation qui eût vraiment été catastrophique.

« Errare humanum est, perseverare diabolicum » comme le disait un des mes vieux maitres ».

CG (29 mai 2012)

A propos Olivier Demeulenaere

Olivier Demeulenaere, 58 ans Journaliste indépendant Macroéconomie Macrofinance Questions monétaires Matières premières
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7 commentaires pour Dexia sous gravier ?

  1. njaisson dit :

    cela veut dire que Dexia s’est mise massivement à découvert sur les obligations de l’Etat français et il semble qu’elle n’ait pas couvert ce risque.

    La chose me paraît tout à fait impossible, étant donné les contraintes que la réglementation Bâle 2 et 3 transposée en directives européennes CRD font peser sur les banques en matière de couverture du risque de marché/crédit, par la mise en réserve de capital réglementaire sur les expositions du banking et trading book de la banque.

    • Beaucoup de choses qui paraissaient impossibles se sont révélées possibles pour les banquiers et les financiers… Cela dit, Charles Gave insiste bien sur le fait qu’il s’agit de rumeurs non confirmées.

  2. Geraldine dit :

    Dexia-Accord franco-belge sur une nouvelle garantie publique

    http://fr.reuters.com/article/frEuroRpt/idFRL5E8GT23020120529

  3. brunoarf dit :

    Il n’y a pas que la banque franco-belge Dexia : les banques espagnoles et les banques italiennes sont dans une situation désespérée. Les dettes des banques espagnoles, les dettes des banques italiennes, les banques de l’Etat espagnol, les dettes de l’Etat italien, toutes ces montagnes de dettes s’empilent les unes au-dessus des autres.

    Jusqu’à ce que tout s’effondre.

    Mardi 29 mai 2012 :

    L’Italie emprunte 8,5 milliards d’euros à six mois à des taux en nette hausse.

    L’Italie a emprunté mardi comme prévu 8,5 milliards d’euros à six mois, mais a dû concéder des taux en nette hausse en raison des fortes tensions sur les dettes des pays fragiles de la zone euro, sous l’effet des inquiétudes concernant l’Espagne, a annoncé la Banque d’Italie.

    Les taux de ces obligations se sont inscrits à 2,104%, contre 1,772% lors de la dernière opération similaire le 26 avril.

    Le marché obligataire est secoué par les craintes des investisseurs à l’égard de l’état de santé du secteur bancaire espagnol, ce qui entraîne une tension des taux espagnols et des taux italiens dans leur sillage.

    La grande banque espagnole Bankia, qui croule sous les actifs immobiliers risqués, a demandé vendredi soir une aide à l’Etat de 19 milliards d’euros.

    L’Italie, qui fait face depuis la mi-avril à un net rebond de ses taux lors de ses émissions, à l’exception d’une certaine détente enregistrée mi-mai, procédera à une nouvelle émission obligataire mercredi, cette fois à moyen-long terme.

    (©AFP / 29 mai 2012 11h25)

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  5. zorba44 dit :

    Bonsoir,

    Même si les rumeurs ne sont exactes qu’à 50%, les ambulances ne servent plus à rien, car leurs réservoirs et leurs pneus sont crevés.

    Jean LENOIR

  6. Pour info : L’analyse de Charles Gave était erronée et il a corrigé le tir. Je viens d’ajouter son addendum.

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