A quoi joue Mme Merkel ? (F. Asselineau)

euro merkel penelopeTelle Pénélope dans l’Odyssée, Angela Merkel détricote la nuit l’euro qu’elle tisse le jour, dans l’attente, non pas d’Ulysse mais de l’explosion inéluctable de la monnaie européenne. D’après le tableau « Pénélope défaisant son ouvrage » de Francesco dal Ponte, dit Francesco Bassano (1549-1592), conservé au Musée des Beaux-Arts de Rennes.

« Pendant que les grands médias focalisent, depuis plus de 10 jours, l’attention de l’opinion publique quasi-exclusivement sur la « menace djihadiste », il se passe des choses d’une grande importance sur le front de l’euro.

Les jours écoulés ont été en effet marqués par deux faits d’importance qui constituent deux nouveaux rebondissements dans cette aventure monétaire qui entraîne tout un continent à la ruine :

  • d’une part les déclarations publiques de la Chancelière d’Allemagne, Mme Merkel, qui s’est dite prête à laisser sortir la Grèce de l’euro, comme si c’était à elle d’en décider.
  • d’autre part la soudaine décision de la Banque nationale de Suisse de ne plus empêcher l’euro de passer en-dessous du taux de change de 1,20 franc suisse.
     

Nous vous en proposons un décryptage. 

  • 6 septembre 2011 : les raisons pour lesquelles la Suisse avait fixé un taux de change plancher pour l’euro face au franc suisse

Le 6 septembre 2011, nos voisins et amis helvètes avaient décidé de fixer un « cours plancher » de l’euro face au franc suisse.

Nous étions alors au plus fort de la crise des dettes souveraines en zone euro et le franc suisse faisait office de valeur refuge, comme c’est si souvent le cas, depuis des décennies, dans l’histoire monétaire. La demande croissante de franc suisse avait pour résultat de faire grimper son taux de change face à l’euro ou, ce qui revient au même, de faire baisser celui de l’euro (EUR) face au franc suisse (CHF).

Le taux de change de l’euro s’était ainsi continuellement érodé : 1,65 CHF en janvier 2008 ; 1,50 CHF en janvier 2009 ; 1,40 CHF en mai 2010 ; 1,30 CHF en septembre 2010 ; 1,25 CHF en janvier 2011 ; 1,15 CHF en juillet 2011 ; et même 1,06945 CHF début août 2011. Tout cela, bien sûr, renchérissait d’autant les exportations suisses et menaçait la Confédération helvétique d’un ralentissement de sa croissance pouvant aller jusqu’à la récession.

La Banque Nationale de Suisse (BNS) était donc intervenue en annonçant l’introduction d’un « cours plancher » de l’euro, qu’elle avait justifié par trois arguments :

– « l’extrême surévaluation » du franc suisse par rapport à l’euro qui venait d’atteindre un « plus bas » historique,

– la menace pour l’économie suisse,

– et le risque déflationniste.

Sur la base de ce constat, la BNS avait fixé à 1,2000 CHF le « cours plancher » en dessous duquel l’euro ne pourrait plus baisser. Dans les jours suivant cette annonce, l’euro remonta brutalement, en effet, de 1,07 CHF à un niveau un peu supérieur à 1,20 CHF.

Bien entendu, cette brutale réappréciation de l’euro face au franc suisse et le maintien du cours de l’euro au-dessus de 1,20 CHF ne se sont pas réalisés par l’opération du Saint-Esprit.

Dans la pratique, la banque centrale de Suisse a dû vendre en masse du franc suisse et acheter en contrepartie de l’euro, afin de déprécier sa propre monnaie jusqu’à atteindre l’objectif de change fixé vis-à-vis de l’euro.

Dans la pratique, cela signifie aussi que la BNS a dû intervenir aussi souvent que nécessaire pour veiller à ce que l’euro ne refranchisse pas à la baisse le seuil plancher de 1,20 CHF, ce qui l’a progressivement amené à accumuler des réserves considérables d’euros.

C’est cette gestion au jour le jour du taux de change externe du franc suisse qui vient de voler en éclat. Le 15 janvier 2015, la Banque Nationale de Suisse (BNS) a capitulé.

Pourtant, voici encore quelques jours, le consensus des experts et des marchés financiers se faisait autour de l’idée que le cours plancher serait maintenu « aussi longtemps que nécessaire », selon l’expression consacrée (dont la forme n’est pas sans rappeler le fameux « whatever it takes »  de Mario Draghi).

La banque Morgan Stanley, par exemple, écrivait encore la semaine dernière, le 8 janvier 2015 : “To be sure, our base case is for the EUR/CHF floor to remain in place, as the SNB’s commitment to purchase unlimited quantities of FX has proven credible to date…” ( http://www.morganstanley.com/institutional/research/pdf/FXPulse_20150108.pdf. Traduction : « Bien sûr, notre scénario de base est que le cours plancher de l’EUR / CHF va rester en place, l’engagement de la BNS à acheter des quantités illimitées de devises s’étant révélé crédible à ce jour… »).

Quant à la recommandation de « trading » de la BNP pour le 15 janvier, elle était d’être « long » d’euro (c’est-à-dire d’avoir acheté des euros) et « court » de franc suisse (d’avoir vendu des francs suisses). Le site Zerohedge a noté cette bévue magistrale avec malice ( https://twitter.com/zerohedge/status/556007540606382080 ).

D’aucuns même spéculaient sur un relèvement du cours plancher vers 1,25, voire 1,30 franc suisse pour 1 euro, dans les mois à venir.

Du côté des autorités, même chose. La surprise a été complète dans les étages de la BCE, ou le scénario n’avait été ni prévu, ni analysé.

Mais la BNS a lâché prise. Cela n’a pas dû être une décision facile à prendre et il est important de comprendre pourquoi.

Lire la suite de l’article sur Agoravox

(via Crashdebug.fr)

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Rappel :

Krach boursier en Suisse après une décision monétaire historique

A propos Olivier Demeulenaere

Olivier Demeulenaere, 58 ans Journaliste indépendant Macroéconomie Macrofinance Questions monétaires Matières premières
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6 commentaires pour A quoi joue Mme Merkel ? (F. Asselineau)

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  2. Hardy dit :

    Ne reste plus qu’à lier le peg du franc suisse avec le cours de l’or , d’y trouver une véritable réponse du pourquoi et l’on aura enfin un peu de clarté sur des événements bien troublants pour le commun des mortels.

  3. zorba44 dit :

    Il est difficile du jour au lendemain de reconnaître qu’on a eu tort pendant des décennies. Mais il faut bien que les bulles éclatent qu’elles soient monétaires, obligataires, actions ou immobilières. Vous remarquerez qu’on ne dit pas « actionnaires » mais certains, bien trop gros, perdront beaucoup de lard en la situation !

    Tout l’art et la manière consiste à faire croire que la faute est à l’autre …comme pour la tuerie de CH, organisée dans l’ombre afin de tirer les marrons du feu et faire sortir les lois scélérates du bois.

    Jean LENOIR

  4. Nanker dit :

    « Tout l’art et la manière consiste à faire croire que la faute est à l’autre …comme pour la tuerie de CH, organisée dans l’ombre afin de tirer les marrons du feu »

    Pipeau pipeau pipeau… Vous croyez qu’en haut lieu, on organise des opérations spéciales avec des bras cassés à deux neurones comme les frères Kaouchi? Souvenez-vous que lorsqu’ils ont arrivé dans cette rue où est domicilié « Charlie » ils sont d’abord entrés dans le mauvais hall d’immeuble. « Charlie » c’était à côté…
    Il est certain qu’il y a eu récupération de la part des politiques (Hollande Netanyahou Kerry), mais organisation de ces attentats? Pipeau pipeau pipeau…

  5. Alcide dit :

    Ce n’étaient pas des Charlots ni des théoriciens du genre ni des branleurs à scooter amateurs de starlettes.
    Ils ont brisé le nazisme à Stalingrad et sauvé les peuples d’Europe.
    Maintenant , ils réclament des explications à la Chancelière Merkel sur l’attitude équivoque de l’Allemagne et de la Commission de l’EU sur le soutien occidental à la renaissance du nazisme en Ukraine .

    « L’Ukraine est plongée dans l’hystérie nazie !.. Mais l’Occident occupe une position très étrange et nous ne la comprenons pas. Elle peut être interprétée comme connivence avec le nazisme ukrainien. Pourquoi les peuples d’Europe réagissent-ils calmement à la violence massive en Ukraine ? Quel est l’objectif authentique de vos sanctions économiques ? Affaiblir la Russie en tant que puissance ? Soutenir le nazisme en Ukraine ? Nous voudrions savoir votre opinion là-dessus ».

    Ils ont rappelé à la chancelière les leçons de la Seconde guerre mondiale et le fait que réécrire l’histoire pourrait conduire à la renaissance du nazisme.

    « A Stalingrad nous avons infléchi le cours de l’histoire au prix d’efforts surhumains. Aussi ne pouvons-nous pas accepter la répétition du nazisme. Nous vous proposons de le combattre ensemble », stipule la lettre.
    Lire la suite: http://french.ruvr.ru/news/2015_01_22/Des-anciens-combattants-de-Stalingrad-proposent-a-Merkel-de-combattre-ensemble-le-nazisme-en-Ukraine-8968/

    Car la réécriture orwellienne de l’Histoire est en route en effet et d’après le MAE de Pologne, ce seraient les Ukrainiens qui auraient libéré Auschwitz …

    Le ministre des Affaires étrangères de Russie Sergueï Lavrov a qualifié de sacrilège la déclaration du ministre des Affaires étrangères de Pologne Grzegorz Schetyna d’après laquelle Auschwitz avait été libéré par les Ukrainiens. M. Lavrov l’a mentionné à l’issue de la rencontre à Berlin des chefs de diplomatie des quatre pays du format Normandie.
    Lire la suite: http://french.ruvr.ru/news/2015_01_22/Moscou-la-declaration-sur-la-liberation-dAuschwitz-par-les-Ukrainiens-est-un-sacrilege-1486/

  6. Nanker dit :

    « Car la réécriture orwellienne de l’Histoire est en route en effet et d’après le MAE de Pologne, ce seraient les Ukrainiens qui auraient libéré Auschwitz … »

    C’est charmant! quand on sait que les kapos les plus sadiques des camps de la mort étaient souvent des Ukrainiens… De toute façon l’Europe a décidé de ne pas inviter Poutine aux commémos du 70ème anniversaire de la libération d’Auschwitz.
    Piétiner la mémoire des millions de morts de la Shoah c’est aussi les valeurs de l’Europe?

    Allez Draghi donne-nous encore une giclée de QE! Plus vite cette devise mourra, plus vite on sera délivrés du cauchemar européen!

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