L’effondrement de l’économie américaine (P. Craig Roberts)

paul craig roberts« Vous souvenez-vous de l’époque où existaient des journalistes réels ? C’était avant que le régime Clinton ne concentre les médias, les transformant en un ministère de la Propagande, un outil de Big Brother.

La fausse réalité dans laquelle vivent les Américains se prolonge dans la vie économique. Le rapport sur l’emploi de vendredi dernier était la continuation d’une longue série de mauvaises nouvelles bidouillées en bonnes nouvelles.

Les médias répètent deux nombres comme s’ils signifiaient quelque chose, les gains (ou pertes) mensuels d’emplois salariés et le taux de chômage, et ignorent les chiffres qui montrent la poursuite du déclin, depuis plusieurs années, dans les opportunités d’emploi alors que l’économie est prétendument en convalescence. La prétendue reprise est basée sur la mesure U.3 du taux de chômage. Cette mesure ne comprend pas les personnes sans emploi qui sont découragées d’en trouver un et ont cessé d’en chercher pendant quatre semaines. La mesure U.3 de chômage ne comprend que ceux qui gardent l’espoir de trouver un emploi.

Le gouvernement a une deuxième mesure de chômage officiel, U.6. Cette mesure, rarement évoquée, intègre parmi les chômeurs ceux qui ont été découragés pendant moins d’un an. Cette mesure officielle est le double de la mesure de U.3 de 5,3%. Cela signifie que le taux de chômage est de plus de 10% après six ans de reprise économique présumée !

L’effondrement de l’économie américaine _ LE SAKER FRANCOPHONEEn 1994, le régime Clinton a arrêté de compter les travailleurs découragés à long terme comme chômeurs. Clinton voulait que son économie paraisse meilleure à regarder que celle de Reagan, donc il a cessé de recenser les travailleurs découragés qui faisaient partie du taux de chômage de Reagan. John Williams (shadowstats.com) continue de mesurer le taux de chômage à long terme selon la méthodologie officielle de cette époque. On peut ainsi constater que quand ces chômeurs sont inclus, le taux de chômage des États-Unis en juillet 2015 est de 23%, plusieurs fois plus élevé que lors de la récession que le président de la Fed Paul Volcker avait offerte à la présidence Reagan.

Un taux de 23% de chômage donne à la reprise reprise économique un sens nouveau. Quatre-vingt-cinq ans sont passés depuis la Grande Dépression, et l’économie américaine est en reprise économique, avec un taux de chômage proche de celui de la Grande Dépression.

Le taux de participation au marché du travail a diminué depuis la reprise qui aurait commencé en juin 2009 et se poursuit aujourd’hui. Ceci est très inhabituel. Normalement, lors d’une reprise économique, les emplois rebondissent, et les gens affluent au travail. Basé sur ce qu’il a dit à ses conseillers économiques, le président Obama a attribué la baisse du taux de participation aux baby-boomers qui prennent leur retraite. En réalité, pendant la prétendue reprise, la croissance de l’emploi a concerné principalement les personnes de 55 ans et plus. Par exemple, en juillet tous les emplois salariés nouveaux concernaient des personnes de 55 ans et plus, alors que la classe d’âge de 25 à 54 ans a perdu 131 000 emplois en juillet.

Au cours de l’année précédente (juillet 2014 – juillet 2015), la tranche d’âge 55 et plus a gagné 1 554 000 emplois et les classes jeunes, 16-18 et 20-24, ont perdu respectivement 887 000 et 489 000 emplois.

De 2009 à 2013, le nombre d’Américains au travail dans la classe d’âge de 25 à 54 ans a diminué de 6 000 000 emplois. Ces années de reprise économique présumée ont apparemment contourné les Américains de la classe d’âge d’activité maximale.

En juillet 2015, les États-Unis avaient 27 265 000 personnes occupant un emploi à temps partiel, dont 6,3 millions, soit 23%, parce qu’ils ne peuvent pas trouver un emploi à temps plein. Il y a 7 124 000 Américains qui détiennent plusieurs emplois à temps partiel pour joindre les deux bouts, soit une augmentation de 337 000 en un an.

 Les jeunes ne peuvent pas fonder de foyers sur la base d’emplois à temps partiel, mais les retraités prennent ces emplois afin de compenser le revenu manquant sur leurs économies à cause de la politique d’intérêt à taux zéro de la Réserve fédérale, qui a pour but de soutenir les bilans d’une poignée de banques géantes, dont les dirigeants contrôlent le Trésor américain et la Réserve fédérale. Avec un si grand nombre d’emplois industriels et de compétences professionnelles délocalisés en Chine et en Inde, tels que l’ingénierie logicielle,  les carrières professionnelles disparaissent aux États-Unis.

Les emplois les plus lucratifs en Amérique concernent ceux qui fabriquent les escroqueries de Wall Street, ceux qui font du lobbying pour des groupes d’intérêts privés, où l’on embauche de préférence d’anciens membres de la Chambre, du Sénat, et de l’Exécutif, et enfin ceux qui montent des programmes pour aider les donateurs des think tanks à s’enrichir, en faisant passer ces programmes pour des politiques publiques, qui peuvent devenir des lois.

Les emplois salariés déclarés pour juillet sont dans les catégories habituelles qui nous sont familières, mois après mois, et année après année. Ce sont les emplois de services domestiques divers, serveuses et barman, vendeurs au détail, transports, entreposage, finance et assurances, soins de santé et assistance sociale. Rien à l’exportation afin de payer nos importations massives. Avec une maigre croissance du revenu réel médian des familles, alors que l’épargne dégringole et que le crédit s’épuise, même la partie consommation de l’économie va fléchir.

De toute évidence, ce n’est pas une économie qui a de l’avenir.

Mais vous ne saurez jamais cela si vous n’écoutez que les médias financiers ou ne lisez que la section économie-finance du New York Times ou du Wall Street Journal.

Si j’étais encore l’éditeur du Wall Street Journal que je fus, l’état déplorable de l’économie américaine serait en première page des nouvelles ».

Paul Craig Roberts, Counterpunch, le 11 août 2015 via le Saker Francophone

Paul Craig Roberts est ancien secrétaire adjoint du Trésor américain et rédacteur en chef adjoint du Wall Street Journal. Son livre  Comment l’économie a été perdue est désormais disponible auprès de Counterpunch en format électronique. Son dernier livre est Comment l’Amérique a été perdue.

Traduit par jj, relu par Diane pour le Saker Francophone

PaulCraigRoberts.org

Rappel :

Chiffres du chômage américain : « Du grand banditisme »

A propos Olivier Demeulenaere

Olivier Demeulenaere, 58 ans Journaliste indépendant Macroéconomie Macrofinance Questions monétaires Matières premières
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19 commentaires pour L’effondrement de l’économie américaine (P. Craig Roberts)

  1. raimanet dit :

    A reblogué ceci sur Raimanet.

  2. zorba44 dit :

    A l’instant le signataire vient de passer sur la US National Debt clock : un million de dollars de dettes supplémentaires en moins de cinq minutes ! On va chercher dans les trois cents millions de dollars de dettes supplémentaires par 24 heures et, sauf erreur, 110 milliards de dollars supplémentaires par an, à ce rythme ! Et, par rapport à il y a quelques mois, le rythme paraît en forte accélération. Ce qui est étonnant est que ce site ne soit pas (encore) fermé.

    Amérique, riche de ses dettes !…

    Jean LENOIR

    • margy dit :

      Selon les dernières interventions de Jim Willie de ce mois d’aout 2015 le US dollar va subir deux dévaluations de 30% chacune. La première va se faire prochainement.
      En ce qui concerne l’Euro cet automne elle subira une dévaluation de l’ordre 50%.
      Paul Craig Roberts sont des patriotes qui nous informent en toute transparente

  3. Ping : L’effondrement de l’économie américaine (P. Craig Roberts) Actualités

  4. Alcide dit :

    Peut-être pas totalement hors sujet mais plutôt collatéral:

    Geo Engineering Doing Most Destruction to Planet-Dane Wigington
    http://usawatchdog.com/geo-engineering-doing-most-destruction-to-planet-dane-wigington/

    Produits efficaces, l’effet sur le cerveau (?) des Charlie est remarquable…

    • zorba44 dit :

      Cher Alcide,

      Pas de la crème fouettée en tout cas… Les fous sont aux commandes pour asservir les autres fous que sont les Charlie. Avec tout ça on n’est pas sorti de l’auberge !

      Jean LENOIR

  5. Nanker dit :

    Petite devinette : je suis un pays qui n’est pas une démocratie, où tous les chiffres officiels sont faux, la TV ment, la surveillance des populations est permanente, j’ai une armée inutile pléthorique et surpuissante et une crise économique frappe durement les gens qui n’en peuvent plus du système qu’on leur impose par la force.

    Je suis je suis… l’URSS de 1980!! Ou les USA des années 2010?
    Les similitudes sont troublantes, non?

  6. Justy dit :

    Craig Roberts explique comment les USA bidouillent les indicateurs économiques.
    Même quand on n’est pas ferre en économie,on s’en doute bien.Il n’y a que sur BFM WC que les journalistes y croient, désespérant régulièrement un autre Olivier…
    Ce matin un autre bidouillage nous apprend que le GDP grec est positif.Il est vrai que les grecs qui ont retire leurs Euros au compte goutes des banques ont acheté des voitures…allemandes!
    Ceci releve aussi de la psychologie .Il s’agit du syndrome de Stockholm : on finit par aimer ses bourreaux.

    • zorba44 dit :

      …on peut même s’inquiéter quand le bourreau ne vient pas vous chercher à l’heure habituelle pour la séance d’interrogatoires et de tortures. En effet, on imagine tout y compris le peloton d’exécution…

      Jean LENOIR

  7. Artachès dit :

    Quand la productivité augmente, le taux de travail nécessaire pour faire tourner l’économie diminue. Il faut seulement que l’ensemble des travailleurs travaillent moins pour gagner autant.

  8. sorbeï dit :

    Les USA Empire de la fin du 20e siècle et du début du 21e ont depuis longtemps renoncé à produire eux mêmes les biens qu’ils consomment avec avidité; ils font travailler le reste du monde en délocalisant et surtout, en payant à crédit avec leur monnaie de singe qui ne leur coute rien le fruit du travail des autres….voilà pourquoi ils sont complètement dépassés, feignants et sous qualifiés…. et n’ont plus qu’une issue : bidouiller à mort leurs statistiques!

    • zorba44 dit :

      Le drame est que même les chinois ont leurs vietnamiens et sri lankais… Plus personne ne veut rien d’autre que consommer et c’est bien là le drame. Y ajouter une sur-infection par le crédit à tout va et la messe est dite.

      Jean LENOIR

    • aulus dit :

      @sorbei: je dirais même que c’est parce que les élites US ont fait un maximum de fric en délocalisant dans les pays à bas coûts que les Américains moyens, perdant leurs revenus, ont été poussés à s’endetter pour tenir leur train de vie…

      • zorba44 dit :

        Il y a un an une des tantes de la femme du signataire montait des colliers fantaisie, à la chaîne et pour 10 pesos pièce – belles pièces facturées 30 £ sterling au client final (30 £ egale 1 800 pesos environ).
        Depuis un an il n’y a plus eu une seule commande !

        Jean LENOIR

      • zorba44 dit :

        Bientôt on bouffera du porc (toujours au même prix) acheté 0,99 € le kilo au producteur, avant l’étape suivante de la baisse !

        Non sens absolu, cul de sac économique : même le plus con des riches devrait le comprendre …mais, voilà, la grande bouffe financière ne s’aperçoit même plus qu’elle courre à sa perte !

        Jean LENOIR

  9. jacquart&jacaton dit :

    Et dire qu’il y a des mecs sur des blogs ou des forums qui ecrivent qu’Olivier Delamarche nous raconte des conneries…

  10. Ping : Juste avant l’impact… | jbl1960blog

  11. Ping : De la chute de l’Empire à la surfusion du Système | Réseau International

  12. Ping : De la chute de l'Empire à la surfusion du système

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